Sciences de la Société

De 1998 à 2009

par Clarisse Aeschlimann et Sonia Parani, février 2016

La création du Domaine des Sciences de la Société

Dans l’Institut de Journalisme germait le désir de fonder une unité de recherche et d’enseignement qui réunissait les disciplines en sciences sociales répartie entre les différentes facultés de l’Université de Fribourg. Ce projet interdisciplinaire était en particulier soutenu par le professeur de sociologie Riccardo Lucchini ainsi que son collègue assigné à l’Institut de Journalisme, le professeur Jean Widmer. A partir de 1992, ces derniers travaillaient concrètement à l’élaboration du projet : Les cours seraient à la fois assurés à la Faculté des Lettres et à la Faculté des Sciences Économiques et Sociales (FSES), à laquelle l’Institut du Journalisme était rattaché. Le projet a été approuvé en 1993, mais sa réalisation finale n’a abouti qu’en 1996. Le nouveau Domaine des Sciences de la Société (DSS) a été inauguré en automne 1998.

"Jean Widmer et M. Lucchini avaient toujours eu l’idée qu’il fallait offrir un programme qui permette aux étudiants d’avoir aussi des enseignements qui touchent de près ou de loin aux sciences sociales, mêmes s’ils n’étaient pas à cette faculté ici (Faculté des Sciences Economiques et Sociales). C’est pour cela qu’ils ont créé le Domaine des Sciences de la Société. C’était quelque chose pour recouvrir les enseignements qui étaient en Lettres, en travail social ou en anthropologie, pour que les étudiants puissent faire des échanges de modules assez facilement. Comme c’était sur deux facultés, ce n’était pas facile. Il y avait l’idée qu’on échangeait des enseignements." Muriel Surdez, professeure associée au Département des Sciences Sociales de l’Université de Fribourg

D’après Alvaro Baragiola, ancien étudiant de l’Institut de Journalisme et désormais collaborateur au décanat de la Faculté des Sciences Économiques et Sociales, le DSS est alors devenu la première institution suisse à fournir des licences interfacultaires. Il incluait les sciences de la communication et des médias, le journalisme, l’ethnologie, la sociologie, le travail social et les politiques sociales, la géographie humaine, l’histoire contemporaine, le droit de l’homme et la science des religions. Ce conglomérat de disciplines sociales eut un succès retentissant parmi les étudiants, leur nombre augmentant chaque année de manière exponentielle. Mais parallèlement, en ce qui concerne l’enseignement du journalisme et des médias, une rupture s’est installée entre les orientations alémaniques et francophones. En effet, avec le nouveau cursus „Sociologie de la Communication et des Médias“, la section francophone affichait une voie d’étude plus que jamais orientée vers la sociologie.

"L’idée n’était pas de dire ‘il y a de la sociologie, il y a des médias’. L’idée était que l’on utilisait la sociologie pour éclairer les médias et que les médias sont de toute façon des parties prenantes de la société. Le but est de dire qu’ils sont complètement inclus dans le fonctionnement social, donc pas forcément un système à part." Muriel Surdez

Vers la séparation

"C’était une construction assez osée, je veux dire qu’il y avait des chaires de deux facultés – les Lettres et les Sciences Economiques et Sociales – et puis à un certain moment, les professeurs des Lettres se sont retirés. Mais de toute façon à un moment donné, les intérêts des professeurs des Lettres divergeaient trop pour continuer comme cela." Boris Boller, ancien étudiant de l’Institut de Journalisme, puis chercheur sous la direction de Jean Widmer

Avec l’apparition des hautes écoles de journalisme en Suisse, l’enseignement du journalisme à l’université a été en cause. Ainsi le rectorat de l’Université de Fribourg considérait que cette discipline était trop tournée vers la production de médias; une partie de l’offre d’enseignement à portée pratique était alors supprimée. Reposant sur le principe interfacultaire, un étudiant du DSS pouvait obtenir pour les mêmes cours fréquentés soit une licence ès Lettres, soit une licence en Arts suivant la combinaison de branches principales et complémentaires qu’il choisissait. En 2002, des problèmes d’administration des étudiants du même domaine en deux facultés ont conduit à une restructuration: la majorité des disciplines qui formaient le Domaine des Sciences de la Société ont été reléguées en Lettres. Le „Département des Sciences de la Société“ regroupait désormais les sciences politiques, la science de la communication et la sociologie des médias.

Ces événements étaient succédés par la réforme de Bologne, qui était facile à adapter pour les sciences économiques, mais n’était pas si simple à mettre en œuvre pour les sciences sociales. Le DSS avait tellement peu d’enseignants qu’il était impératif de former des alliances avec d’autres départements pour valider le master.

Le décès de Jean Widmer en février 2007 a causé de graves problèmes pour la voie d’étude „Sociologie de la Communication et des Médias“ qui a perdu ainsi son principal représentant. Les autres professeur-e-s francophones du Département ont quitté la Faculté des Sciences Economiques et Sociales en 2009 pour collaborer avec les autres branches des sciences de la société dans la Faculté de Lettres – les branches qui avaient fait partie de l’ancien DSS. Après s’être séparé de la plupart de l’enseignement sociologique, le „Département des Sciences de la Société“ est devenu le „Département des Sciences de la Communication“. Désormais, tout était à refaire pour la section francophone.

"C’était très douloureux pour nous tous. Nous avons trouvé que c’était vraiment du gâchis parce que nous aurions pu faire quelque chose d’absolument unique en Suisse et même au-delà. Cela n’a malheureusement pas été perçu de la même façon par tous les acteurs impliqués." Heimke Peiry, secrétaire de Jean Widmer