Témoigner pour lutter contre les discriminations

Témoigner pour lutter contre les discriminations

Vous êtes témoin ou vous vivez une situation discriminante au sein de l’Unifr? Pas toujours facile de témoigner. La Commission Equal Opportunities de l’Association générale des étudiant·e·s met à votre disposition un outil de report des discriminations. Totalement anonyme, il permettra de prendre la mesure de la situation sur nos campus. Lara Torbay, co-présidente d’EquOpp, répond à nos questions.

Sur quels constats Equopp a-t-elle décidé de proposer cet outil?
Après le scandale lié à de l’homophobie dans un cours de la Faculté de théologie, nous avons réalisé que les personnes souhaitant garder leur anonymat et ne pas entamer une procédure auprès du Service de médiation n’avaient aucun moyen d’agir face à des discriminations.

En plus, en tant qu’association agissant pour la justice sociale au sein de l’Université, nous avions déjà reçu des témoignages de personnes dépourvues face à certains comportements, une situation qui les rendait profondément mal à l’aise et entravait leurs études. Face à ces constats, nous avons décidé de remédier à la situation en permettant à toute la communauté universitaire de reporter facilement et anonymement les situations qu’elle ressent comme discriminatoires.

En quoi cet outil consiste-t-il?
Il s’agit d’un court questionnaire en ligne, actuellement disponible sur le site de l’Association générale des étudiant·e·s de l’Université de Fribourg (AGEF). Les questions sont, avant tout, axées sur le déroulement des faits (quels gestes/propos jugés discriminatoires ont eu lieu et dans quel contexte), ainsi que sur les critères de discrimination auxquels ils se rattachent. A la fin du questionnaire, les participant·e·s sont invité·e·s à proposer des façons de prévenir ces comportements jugés discriminatoires. Ces suggestions leur permettent de devenir actives et actifs dans le processus de lutte contre les discriminations.

Par qui et comment l’outil a-t-il été élaboré?
Il a été élaboré par les membres d’EquOpp, en mobilisant les compétences de chacun·e des membres (en informatique, en sciences sociales, en psychologie et en droit) pour créer un outil de qualité. Ce travail bénévole nous a occupé·e·s de nombreuses heures, notamment pour tenir compte des suggestions qui nous étaient transmises et créer un outil sûr garantissant l’anonymat de toutes et tous. Nous avons également collaboré avec d’autres services universitaires, telles qu’Unicom Communication & Médias ou l’AGEF pour créer un projet pour et par la communauté universitaire.

Qui peut témoigner?
Tout membre de la communauté universitaire peut témoigner (étudiant·e·x·s, mais aussi corps technique, corps administratif, corps enseignant, etc.), lorsqu’elles ou ils sont témoins ou cibles de comportements jugés discriminatoires.

Qui réceptionne les témoignages et que deviendront-ils?
Selon le règlement cadre du groupe de travail, seule une personne, élue par le CE, est habilitée à consulter les données, qui sont, rappelons-le, anonymes. Le but est d’obtenir un rapport statistique avec des données agrégées pour avoir une vue d’ensemble à l’échelle de l’Université. Idéalement, cela nous permettrait de dégager des tendances et de laisser la liberté aux instances décisionnaires de prendre des mesures pour améliorer la situation au besoin et si elles le souhaitent.

S’agit-il uniquement d’un outil de report ou la plateforme s’inscrit-elle dans un concept plus large de lutte contre les discriminations?
Il s’agit effectivement d’un outil qui s’inscrit dans une lutte plus large contre les discriminations. Cet outil nous permet de voir si les membres de la communauté universitaire pensent que des discriminations ont lieu à l’Unifr et, le cas échéant, de quels types elles sont et dans quels cadres elles s’exercent. Cela permet à toute instance et association universitaire qui le souhaite et qui en a la possibilité, EquOpp inclue, d’agir de manière ciblée et efficace contre les discriminations.

Sonder le ressenti de la communauté universitaire nous permet d’établir un état des lieux crucial. Si les membres de cette communauté jugeaient les discriminations absentes de l’Université, cela représenterait un grand soulagement. A l’inverse, si une partie de la communauté universitaire se sent ciblée par des discriminations, cet outil nous permettra de le montrer et d’alerter les instances en charge. Bien entendu, à qui nous transmettrons ces données et ce que nous en ferons de manière générale n’est pas de notre seul ressort, mais soumis à un règlement cadre et aux décisions du CE.

Quel est le but recherché?
Nous sommes véritablement dans une approche préventive et non pas punitive. Le questionnaire vise à faire ressortir des tendances, afin de prévenir, dans l’idéal, les situations discriminatoires. Nous ne cherchons pas de coupables à punir, ni la censure. Il s’agit ici de sonder le ressenti de la population au sein de l’Unifr, au même titre que les questionnaires qui nous parviennent en tant qu’étudiant·e·s sur la qualité de l’enseignement ou les mesures sanitaires prises dans le cadre de la pandémie. Cela permet un échange sur le sujet et encourage toute personne à se poser des questions quant à son vécu et ses actions au sein de l’Université. Le but est également d’éviter l’invisibilisation des discriminations et de rester à l’écoute de toute la communauté universitaire. Sonder son ressenti sur ce sujet est crucial pour permettre une atmosphère de travail, de recherche et d’étude saine et ouverte à toutes et tous. L’Université de Fribourg est d’autant plus riche et prestigieuse que toute personne la fréquentant est libre d’y travailler, d’apprendre et d’échanger sans craindre d’être atteinte dans sa dignité. Nous espérons que ce questionnaire œuvre dans ce sens.

L’outil est en phase pilote. Quelles seront les prochaines étapes?
Nous allons récolter des données pendant ce semestre et auront notre premier rapport à la fin de celui-ci. Nous allons également prendre en compte les remarques et suggestions qui nous seraient éventuellement relayées par les utilisatrices et utilisateurs. Ce dialogue nous tient particulièrement à cœur, car il permet de tendre vers une amélioration du questionnaire et une plus grande inclusivité. Nous espérons ensuite pouvoir le prolonger au moins un semestre pour voir les tendances qui se dessineraient en présentiel. Sur le long-terme, nous souhaitons que cet outil reste toujours à disposition de la communauté universitaire, afin de maintenir cette écoute et poursuivre le dialogue.

Author

Exerce d’abord sa plume sur des pages culturelles et pédagogiques, puis revient à l’Unifr où elle avait déjà obtenu son Master en lettres. Rédactrice en chef d’Alma & Georges, elle profite de ses heures de travail pour pratiquer trois de ses marottes: écrire, rencontrer des passionnés et partager leurs histoires.

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