Parce que leur curiosité est insatiable, mais aussi parce qu’elles refusent de se limiter au champ étriqué de leur thèse, Malika Tapparel et Laure von der Weid ont créé un podcast intitulé «La tête dans les données». Avec une aisance assez déconcertante, les deux doctorantes de l’Université de Fribourg y interviewent des chercheuses, afin de «rendre accessibles au grand public les dernières avancées scientifiques et leurs implications sociétales».
En plein doctorat, vous avez décidé de créer un podcast. Quelle mouche vous a piquées?
Laure: Durant la thèse, nous travaillons intensément sur un sujet extrêmement précis, pointu. J’estime qu’il est très important de ne pas oublier qu’il existe des recherches passionnantes en dehors de notre domaine d’expertise. Sans compter, bien sûr, que nous sommes passionnées par la science au sens large.
Mais pourquoi avoir choisi de créer un podcast plutôt que, par exemple, assister à des conférences ou écouter des podcasts créés par d’autres? Ça aurait été moins chronophage!
Malika: Tout simplement parce que réaliser une interview, c’est avant tout l’occasion de faire de belles rencontres. Ça nous ouvre des horizons et nous insuffle une motivation nouvelle pour nos propres travaux.
Vous avez décidé d’opérer un casting particulier en choisissant de mettre en lumière uniquement les femmes de sciences. Pour quelles raisons?
Laure: À vrai dire, notre premier hôte devait être un homme… mais il a décliné l’invitation. Cela dit, le problème du manque de femmes dans la recherche est une évidence. J’ai par exemple fait des études en psychologie, branche réputée pour attirer plutôt des femmes, mais je n’ai eu que très peu de professeures. Nous avons donc décidé de les mettre en avant.
Comment choisissez-vous vos invitées et les thématiques que vous souhaitez aborder?
Laure: Jusqu’à présent, nous avons choisi des sujets en lien avec nos domaines d’études, les neurosciences et la psychologie, tels que le fonctionnement du cerveau, l’influence des émotions sur notre alimentation ou encore les addictions aux réseaux sociaux. Ces thématiques nous parlent et nous nous sentons une certaine légitimité pour les aborder. Nous regardons également si la personne que nous souhaitons inviter a déjà donné des interviews, si elle s’exprime bien et si elle est douée pour la vulgarisation scientifique.
Vos hôtes acceptent-elles volontiers votre invitation?
Malika: Oui, et j’en suis la première surprise! Quand nous avons songé à inviter Anaïs Llorens, chercheuse à l’Institut de Psychiatrie et Neurosciences de Paris, nous avons pensé qu’elle aurait certainement d’autres priorités que de venir nous rencontrer. Or, elle s’est montrée très enthousiaste.
Laure: Je pense que le fait que nous soyons doctorantes n’est pas pour déplaire à nos invitées. Je m’attendais aussi à ce qu’on essuie quelques refus de personnes ne souhaitant pas être filmées, mais pas du tout.
Filmer, cela rend les choses techniquement beaucoup plus complexes. Vous aviez quelques notions avant de vous lancer?
Laure: J’avais déjà fait quelques vidéos pour YouTube et TikTok, mais, n’ayant jamais fait d’école de cinéma ou de cours de montage, cela me prend beaucoup de temps.
Malika: Nous sommes plutôt autodidactes, mais nous avons aussi demandé des conseils à des connaissances plus expérimentées, notamment pour l’acquisition du matériel audio et vidéo.
On vous sent très à l’aise, aussi bien sur la forme que sur le fond. Aviez-vous déjà travaillé dans le domaine audiovisuel?
Laure: J’ai travaillé à Fréquence Banane, la radio des étudiant·e·s de l’Université de Lausanne, et à Radio Vostok, à Genève.
Malika: Il faut aussi dire que nous nous creusons soigneusement le sujet avant toute interview. Nous cherchons à connaître les recherches des invitées et lisons toujours plusieurs articles qu’elles ont publiés.
Laure: C’est aussi notre plus-value: lors du premier podcast sur les liens entre émotions et nourriture, nous ne nous sommes pas contentées de demander si le fait de manger du chocolat rendait heureux. Nous pouvons aller plus loin. Je pense d’ailleurs que nos invitées apprécient notre capacité à rebondir.
Quel sera le thème de votre prochain podcast?
Malika: Nous allons tenter de répondre à la question suivante: est-ce que ChatGPT a une conscience?
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