En collaboration avec les Goûters scientifiques de l’Unifr, la série d’Alma&Georges «Ask A Scientist» ne s’adresse pas uniquement aux enfants, mais à toutes et tous les passionné·e·s de sciences qui aiment aller au fond des choses. Dans chaque article, un·e jeune pose une question scientifique à laquelle l’un ou l’une de nos professeur·e·s doit répondre.
Du haut de ses huit ans, Lena souhaiterait savoir pourquoi l’eau de mer est salée alors que l’eau des lacs ne l’est pas. Nos expert·e·s du Département de géosciences, Nicole Clerx, Eric Pohl, Mathilde Fautras et Rony Emmenegger ont potassé une réponse qui ne manque pas de sel !
L’histoire de la mer salée commence par la question de l’origine du sel. Les sels sont contenus dans de nombreuses roches, par exemple dans les roches des montagnes. Si l’eau a un goût salé, c’est parce que les sels sont solubles dans l’eau: ils sont invisibles, mais bien présents dans le liquide. Cela signifie que lorsqu’il pleut et que l’eau s’écoule sur les roches, le sel se dissout et est transporté avec l’eau. Il se passe la même chose quand on fait cuire des pâtes: on jette une pincée de sel dans l’eau des pâtes et le sel «disparaît» (en fait, il se dissout dans l’eau). On peut facilement le vérifier en goûtant l’eau (attention, pour ne pas se brûler il faut laisser refroidir l’eau avant). Plus il y a de sel dissous dans l’eau, plus l’eau est salée. Cependant, la plupart du temps, les sels sont présents en très petites quantités dans la nature. C’est pourquoi l’eau des rivières et des lacs (les rivières transportent l’eau vers les lacs) ne nous semble pas salée. En réalité, elle est également salée, mais si peu que nous ne pouvons pas nous en rendre compte simplement en la goûtant. On peut également vérifier cela en mettant un seul grain de sel dans un verre d’eau au lieu d’une pincée entière de sel: le sel se dissout, mais l’eau ne semble pas avoir un goût plus salé qu’auparavant.
L’évaporation entre en action
A la surface de la Terre, l’eau faiblement salée de nos lacs et nos rivières finit par rejoindre la mer en aval. La mer reçoit donc continuellement de l’eau et du sel. En principe, l’eau de mer devrait être aussi salée que les rivières et les lacs, pourtant elle ne l’est pas: elle est plus salée qu’en amont. Pourquoi? Ceci est dû à un processus appelé évaporation et au fait que nos mers sont très, très, très anciennes. L’évaporation signifie que l’eau passe de la forme liquide à l’état gazeux (sous forme de vapeur d’eau). C’est également ce qui se passe lors de la cuisson dans une casserole: l’eau s’évapore dans l’atmosphère et le volume d’eau de la casserole diminue. Il y a alors autant de sel, mais moins d’eau qu’avant. En effet, lors de l’évaporation, seule l’eau s’évapore, pas le sel. Le sel reste dans la mer. On peut le vérifier en mettant une cuillère de sel dans un verre et en ajoutant juste assez d’eau chaude pour dissoudre tout le sel. Si l’on laisse ensuite le verre de côté pendant plusieurs jours, on peut voir d’une part que le volume d’eau diminue (car celle-ci s’évapore) et d’autre part que le bord du verre devient blanc: c’est le sel qui est retenu sous forme solide. Il faut savoir que les mers sont très, très, très anciennes. C’est pourquoi beaucoup, beaucoup, beaucoup d’eau s’est déjà évaporée des mers au cours de leur vie.
Les mers n’ont pas le même goût que les lacs
Dans l’exemple du verre d’eau et d’un seul grain de sel, on observerait également l’évaporation. Le sel reste lorsque toute l’eau s’est évaporée. Si l’on grattait le sel restant, on obtiendrait à nouveau exactement la quantité de sel du grain de sel. Cela se produit aussi bien dans les lacs que dans la mer. La grande différence est que l’eau du lac continue à s’écouler en aval (en direction de la mer), alors que l’eau de la mer ne s’écoule pas plus loin – la mer est le terminus pour l’eau sous sa forme liquide. C’est pourquoi il y a de plus en plus de sel dans la mer. Mais le volume d’eau n’augmente pas, car celle-ci s’évapore, est transportée par les vents sous forme de vapeur d’eau, se transforme en nuages et tombe en pluie quelque part, par exemple dans les montagnes. Là, elle dissout à nouveau le sel des roches, le transporte à travers les rivières et les lacs (dans lesquels nous ne pouvons pas sentir les faibles quantités de sel), jusqu’à la mer. Comme nos mers sont très, très vieilles (parfois des centaines de millions d’années), le sel s’y est accumulé en grande quantité et le goût salé y est beaucoup plus facile à sentir.
Il est intéressant de noter qu’il existe des mers jeunes et des mers anciennes, et que les plus jeunes ont effectivement un goût moins salé. La mer Baltique, par exemple, a un goût nettement moins salé que la mer du Nord (Atlantique) qui existe depuis plus longtemps. Et les mers qui ne reçoivent plus d’eau de fleuves (comme la mer Morte) ne font que s’évaporer: le sel présent ne’est donc plus dilué par un apport d’eau douce. Ces eaux marines sont alors encore bien plus salées que celles de l’océan Atlantique ou Pacifique.
Plusieurs jeunes scientifiques du Département de géosciences se sont assemblés pour répondre à la question de Lena. Nicole Clerx est assistante diplômée, Eric Pohl post-doctorant, Mathilde Fautras chercheuse senior et Rony Emmeneger, chercheur senior.
- Site des Goûters scientifiques
- MediaLab: Un studio et de l’équipement vidéo pour l’Unifr - 31.10.2024
- Tourisme dans les Rocheuses: des Suisses premiers de cordée - 29.10.2024
- Ein spannendes Buch … aber zum Einschlafen! - 16.10.2024