Avons-nous droit à l’erreur? Quelle marge nous laisse la justice et celle-ci peut-elle se tromper? Le nouveau cycle du Droit dans le cinéma se penche sur ses questions en six films. Le Professeur Walter Stoffel, organisateur du cycle, a répondu, sans fautes, à nos questions.
Walter Stoffel, cette année le cycle Droit dans le cinéma se consacre à la notion d’erreur. Quel est le point commun des films que vous avez choisis?
C’est d’abord la possibilité de se tromper, que ce soit sur la nouvelle vie qu’on se projette dans l’exil, dans le fait condamner un innocent et de libérer le coupable, ou encore dans la réalisation d’un projet de société qui échoue. Mais ces films ont aussi en commun d’élaborer une réflexion sur la portée de l’erreur. Certaines peuvent et doivent être corrigées, mais il en est d’autres qu’il vaut mieux taire, car leur révélation fait plus de mal que de bien.
Quelle place le droit accorde-t-il à l’erreur?
L’erreur fait partie de la vie. Le droit ne peut l’empêcher. Il pourrait éviter qu’une décision juridique soit prise avant avoir écarté toutes les sources d’erreur. Mais un tel procédé – à supposer qu’il soit possible – a un prix. Il s’agit d’une utopie qui implique que beaucoup de décision ne seraient tout simplement plus prises du tout. Est-ce vraiment ce que nous voulons?
L’erreur n’implique-t-elle pas l’idée de pardon? La notion de jugement peut-elle lui laisser une place?
Non, l’erreur n’implique pas nécessairement le pardon. L’auteur a souvent un droit à l’oubli, mais les victimes, elles, peuvent avoir un droit à ce que nous n’oubliions pas. Il ne s’agit pas seulement d’examiner comment le droit gère l’erreur, mais aussi comment cette façon de faire est perçue – et jugée – par le monde non juridique. Le cinéma peut être un moyen formidable de mémoire collective.
Et qu’en est-il de l’erreur judiciaire ? La prédominance toujours plus importante de la preuve scientifique est-elle garante d’une justice «parfaite»?
Les moyens de police scientifique sont d’un certain secours, mais il ne faut pas se faire d’illusions, surtout quand nous voulons prédire l’avenir. Prévenir un crime est une bonne chose, bien sûr, mais arrêter quelqu’un parce qu’un algorithme le désigne comme futur malfrat, en est une autre.
- Le cycle «Droit dans le cinéma» débute cette année le mercredi 19 février 2020, à 18h30 au Cinéma Rex avec une projection de Baghdad In My Shadow en présence de son réalisateur Samir, qui participera également à la table ronde qui suivra en compagnie de Lisa Mazzone, conseillère aux Etats (GE) et de la Professeure Sarah Progin-Theuerkauf de la Chaire de droit européen et droit des migrations de L’Unifr.
- Le programme complet du cycle est disponible ici.