Du Parlement fédéral à la résistance civile, en passant par les médias, les sphères internationales ou le quotidien d’un exécutif communal, une table-ronde a réuni cinq actrices et acteurs de la transition environnementale à l’Université de Fribourg.
Que ce soit dans l’ambiance feutrée de la Berne fédérale ou la main collée sur le bitume, politicien·ne·s écologistes et activistes du climat œuvrent avec le même objectif: convaincre, rallier des soutiens, faire bouger les lignes. Ce constat ressort d’une table-ronde organisée lors de la Semaine de la durabilité qui s’est tenue à Fribourg, comme dans neuf autres villes de Suisse durant ce mois de mars.
Cette table-ronde s’inscrivait dans un riche programme, proposé du 6 au 10 mars par Myosotis, association estudiantine de l’Université de Fribourg pour la protection de l’environnement. Pour cette soirée, cinq intervenant·e·s aux profils bien marqués: «Notre idée était de montrer que l’on peut être actif ·ve à tous les niveaux», explique Robin Jolissaint, co-animateur de cette table-ronde avec Lorie Biderbost.
Pugnacité de l’opposant·e
Aux côtés du syndic de la Ville de Fribourg, le socialiste Thierry Steiert, on trouvait ainsi l’activiste Cécile Bessire, cofondatrice de Renovate Switzerland, Raphaël Mahaim, conseiller national vert et co-fondateur des Avocats pour le climat, Marie-Claire Graf, fondatrice des Semaines de la durabilité en Suisse et invitée à la COP25 ainsi qu’Alexia Tissières, cofondatrice du média Mieux!.
But de la rencontre: présenter un panel des rôles actifs dans les politiques de transition écologique et familiariser le public avec les objectifs et les limites de ces arènes politiques. Comprenez par là des lieux d’interactions et de luttes où se décide la durabilité. Des mondes très différents, mais où se déploie une même cause.
Sous la coupole fédérale, il faut la pugnacité tranquille d’un Raphaël Mahaim. «Dans le système politique suisse, les écologistes sont minoritaires. Notre objectif est de tirer au maximum la couverture vers nous, de déplacer le centre de gravité sur les préoccupations écologiques. C’est parfois frustrant d’être dans l’opposition, car nous engrangeons très peu de victoires», explique le conseiller national.
La force du nombre
Convaincu que «l’action collective permet d’amener du mieux», il déplore le scepticisme de certains activistes du climat. «Prétendre que la politique, c’est perdu d’avance, cela décourage les politicien·ne·s qui s’engagent. C’est d’autant plus regrettable que, face à nous, de puissants lobbys freinent la transition écologique.»
Son travail? «Négocier et convaincre.» Deux mots qui inspirent Cécile Bessire, même si la manière diffère. «On fait exactement la même chose, mais à l’extérieur du Parlement», réagit la co-fondatrice du collectif Renovate Switzerland. Son terrain d’action, c’est l’opinion publique; son chemin, la résistance civile. Elle croit en la force du nombre: «Mon but est de contribuer à construire un mouvement social, à mobiliser les gens pour qu’ils s’engagent et fassent changer les choses.»
Autre point d’appui de la mobilisation, l’information. Cofondé par Alexia Tissières, le média citoyen Mieux! y travaille en proposant du contenu en ligne gratuit à un public jeune. «Le journalisme est une arène essentielle, car elle soutient toute les autres», relève-t-elle, déplorant une couverture trop souvent superficielle des questions environnementales par les médias traditionnels.
«Les sujets devraient être traités de manière plus transversale. On devrait à chaque fois se questionner.» Refusant une position de «simple spectatrice», elle se décrit comme une journaliste engagée. Si elle ne croit pas à l’objectivité journalistique, elle souligne l’importance de la transparence des sources. «Il s’agit d’être attentif au risque de désinformation.»
Du global à l’exécutif communal
Tandis que Mieux! traite de l’information suisse et romande, Marie-Claire Graf porte la voix du changement aux niveaux local, national et global. Co-fondatrice de la Semaine de la durabilité, elle s’active dans de nombreuses autres structures. En 2019, à 23 ans, la jeune Bâloise a été mandatée par le Conseil fédéral pour représenter la Suisse à la COP25 de Madrid.
S’impliquer à l’échelon international est important, dit-elle, même si cela peut paraître loin de nos préoccupations quotidiennes. Le changement global appelle certes une réponse globale, mais il ne faut pas oublier que les Etats gardent beaucoup de pouvoir, selon Marie-Claire Graf. «La plupart peuvent faire davantage.»
A l’autre bout de la lorgnette, on trouve les réalités d’un exécutif communal, là où agit Thierry Steiert, syndic de la ville de Fribourg. Mais avec quelle latitude? «Nous pouvons faire évoluer les choses, mais pas sans contrainte.» Il cite l’exemple du cadre très serré des marchés publics, ce qui n’empêche pas le chef-lieu cantonal d’opérer sa transition énergétique: chauffage à distance, panneaux solaires, etc.
Pas de clash générationnel
Pour l’élu, la mutation verte tient en l’addition de mesures. Une politique des petits pas en somme. Par exemple, il y a quelques années, lui et son exécutif se sont battus, avec succès, pour le maintien de l’alimentation électrique des trolleybus. Une persévérance et une conviction qu’il est possible de faire changer les choses qui se retrouvent chez nos cinq intervenant·e·s.
Et à la question d’une personne du public quant à un conflit générationnel, ils et elles se montrent prudent·e·s. «Renovate Switzerland compte des personnes de tous âges, répond Cécile Bessire. Dans le sillage de Greta Thunberg, on a pensé que c’étaient les jeunes. Mais ce que partagent celles et ceux qui s’engagent, c’est d’abord une même inquiétude pour ce qui a de la valeur pour nous.»
__________- Page de l’Association Myosotis
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- Image de une © Pierre Koestinger
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