PaléontologiePublié le 21.12.2023
Un gisement connu de longue date livre de nouveaux secrets
Les paléontologues manquent de fossiles pour retracer l’histoire évolutive de la région amazonienne, région qui se caractérise pourtant par une biodiversité sans pareille. En exploitant les données d’un site connu depuis plus d’un siècle, Juan Carrillo, chercheur à l’Université de Fribourg, et ses collègues d’autres institutions, ont fait des découvertes exceptionnelles qui jettent un éclairage nouveau sur ce passé méconnu.
La forêt tropicale amazonienne possède une incroyable biodiversité, fruit d'une très longue histoire émaillée de variations climatiques et paysagères. Comme toutes les régions tropicales, elle se caractérise par un nombre d’espèces végétales et animales plus élevé que partout ailleurs dans le monde. Les fossiles pourraient nous aider à remonter le fil de cette évolution mais, dans ces contrées d’Amérique du Sud tropicale, rares sont les gisements bien étudiés.
Un site fossilifère d’exception
Rares, mais pas inexistants! Dans ce qui s’appelle aujourd’hui le désert de Tatacoa, en Colombie, se trouve le site fossilifère de la Venta, un site bien connu des paléontologues. Les chercheuses et chercheurs y ont mis au jour des fossiles vieux de 13 à 11 millions d’années dans un état de préservation exceptionnelle. D’une grande diversité faunistique, ces fossiles attestent de l’existence d’une ancienne forêt tropicale. A cette époque, la partie nord des Andes ne s'était pas encore soulevée et le climat était considérablement plus chaud qu'aujourd'hui.
Connu mais peu étudié
Cela fait un siècle déjà que les paléontologues connaissaient le site du désert de Tatacoa, mais les dernières expéditions importantes remontaient à plusieurs décennies. Récemment, un groupe interdisciplinaire de chercheuses et chercheurs d'institutions colombiennes et internationales, parmi lesquels Juan Carrillo de l’Université de Fribourg, a repris les études paléontologiques sur ce site en étroite collaboration avec la communauté locale de La Victoria, une petite ville rurale d'environ 3 000 habitants.
De nouvelles découvertes
De repasser au peigne fin ce site et les «vieilles» trouvailles a permis aux paléontologues de faire des découvertes exceptionnelles, telles que le plus ancien parent de la tortue du fleuve Amazone, une ancienne espèce de poisson-chat et un fossile exceptionnel d'un marsupial à dents de sabre éteint. Les résultats montrent que malgré un siècle de recherche, il reste encore beaucoup à apprendre de ce site, ce qui aidera les scientifiques à comprendre comment les changements climatiques et les événements géologiques, tels que le soulèvement des Andes, ont influencé l'évolution de la biodiversité tropicale.
Un impact scientifique, mais aussi local
Grâce au travail conjoint de scientifiques et de jeunes leaders de la communauté locale de La Victoria, un nouveau musée a récemment été créé. Celui-ci contribue au développement du tourisme dans la ville et remplit également de nombreuses missions éducatives, ce qui revêt une grande importance pour la protection et l'étude du patrimoine paléontologique.
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CARRILLO J. D. (ed.) 2023. — Neotropical palaeontology: the Miocene La Venta biome, Geodiversitas, vol. 45, arts 3, 6, 10, 12, 13, 15, 18, 25, 26.
Illustration credit: Guillermo Torres. Banco de Imágenes Ambientales (BIA). Instituto de Investigaciones de Recursos Biológicos Alexander von Humboldt.