Un pôle de compétence pour l’intelligence augmentée au cœur de la Suisse

Un pôle de compétence pour l’intelligence augmentée au cœur de la Suisse

Moteurs de recherche, voitures autonomes, chatbot, etc. L’intelligence artificielle s’immisce irrésistiblement dans notre vie quotidienne, mais, pour accompagner son développement, scientifiques et politiques doivent impérativement encadrer cette nouvelle technologie. C’est la mission du SCAI (Swiss Center for Augmented Intelligence), un réseau de compétences soutenu par la Région Capitale suisse.

A moins d’avoir joué les Robinson Crusoé sur une île isolée, vous n’avez pas pu échapper à l’ouragan ChatGPT, un outil basé sur l’intelligence artificielle lancé la semaine dernière et capable de rédiger seul des programmes informatiques, d’écrire des poèmes ou de vous suggérer un menu de Noël pour votre belle-mère végétarienne. Qui peut le plus peut le moins! Déjà bien présente dans nos vies, l’intelligence artificielle (IA) est sur le point de changer en profondeur le monde du travail et notre quotidien. A vrai dire, on y est déjà confronté tous les jours ou presque. Une réclamation à adresser à son opérateur téléphonique? Impossible ou presque d’interagir directement avec un humain sans préalablement avoir affaire à un chatbot, un robot conversationnel, qui filtrera nos besoins afin de mieux nous orienter. Vous aurez aussi peut-être déjà croisé une navette autonome qui, sans pilote, suit un itinéraire prédéfini, détecte, identifie et évite les obstacles. Et bien, tout cela ne serait pas possible sans recours à l’IA. Les perspectives ouvertes par cette technologie sont immenses, infinies, mais aussi effrayantes. D’ailleurs, quand on lui demande de nous expliquer les risques de l’IA, ChatGPT sait verser dans l’autocritique. Voici sa réponse, fournie en quelques secondes, brute et non corrigée:

«1.      Perte d’emplois: L’IA peut automatiser certaines tâches et remplacer les travailleurs humains, ce qui peut entraîner une perte d’emplois.

2.      Biais de l’IA: L’IA peut être entraînée sur des données qui reflètent des biais existants dans la société, ce qui peut se traduire par des décisions ou des actions discriminatoires.

3.      Violation de la vie privée: L’IA peut collecter et utiliser des données personnelles à des fins commerciales ou de surveillance, ce qui peut compromettre la vie privée des individus.»

Impressionnant, non? L’Intelligence artificielle est un outil incontournable, fabuleux, mais auquel il convient de fixer des règles éthiques et légales.

La Région capitale suisse se positionne
C’est cet objectif que poursuivent les cinq cantons (BE, NE, FR, SO, VS) de Région capitale suisse. Depuis deux ans, ceux-ci financent le projet SCAI, acronyme de Swiss Center for Augmented Intelligence. L’idée est de favoriser et d’accompagner le développement de l’intelligence artificielle en créant des synergies entre 10 institutions régionales, dont les compétences multidisciplinaires – sur les plans scientifiques, juridiques et éthiques – sont susceptibles de contribuer au développement d’une IA responsable environnementalement et socialement, ainsi qu’avec un ancrage suisse. «Nous appelons de nos vœux une intelligence artificielle centrée sur l’humain, affirme Denis Lalanne, cheville ouvrière du projet, une intelligence augmentée plutôt qu’une intelligence artificielle qui permette à l’humain d’être plus performant, plus efficace, mais pas uniquement dans un sens productiviste, également en terme de durabilité et de bien-être». Présent lors de la première conférence publique de SCAi le 17 novembre dernier à Berne, Erich Fehr, maire de Bienne, est convaincu des vertus de l’IA pour la société, mais estime qu’il faudra faire preuve de pédagogie: «Il faut écouter les craintes, comprendre les résistances. Politiques, scientifiques et médias doivent expliquer la thématique. La région ne doit pas manquer le train de l’IA!»

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La poste déjà confrontée aux enjeux de l’IA
Pour Christian Levrat, président du Conseil d’administration de La Poste et intervenant lors de cette conférence, il ne s’agit plus de savoir si l’on est pour ou contre l’IA, mais plutôt de réfléchir aux principes de sa mise en œuvre: «On souhaite que l’IA soit au service de l’humain et pas l’inverse, comme chez Amazon par exemple.» Actuellement le géant jaune s’appuie déjà sur l’IA, notamment dans les centres d’appel qui recourent à des agents conversationnels (chatbot), ainsi que pour optimiser les tournées de livraison. Le Gruyérien considère toutefois que cette nouvelle technologie, sans laquelle de nombreuses stratégies de La Poste ne seraient plus envisageables, mérite une réflexion approfondie: «Imaginez que La Poste sache quel·le·s client·r·s reçoivent régulièrement des courriers de sociétés de recouvrement, illustre-t-il, que nous collections ces données et que nous les mettions ensuite à la disposition de tiers!  Il en va du respect de la vie privée de nos client·e·s.»

Valeurs à inculquer à l’IA
Comme les enfants, il ne suffit pas de nourrir l’IA – de données en l’occurrence –, il faut aussi l’éduquer. Les scientifiques le savent: les algorithmes de reconnaissances faciales peuvent très facilement identifier les hommes blancs, moins les femmes de couleur. Ils souffrent donc d’un biais qui peut engendrer des discriminations. Il convient d’y veiller et de se poser les bonnes questions: qui inculque à l’Intelligence artificielle ce qu’elle doit décider et selon quelles valeurs? Pour illustrer le problème Denis Lalanne évoque le dilemme du tramway: «Imaginons un tramway hors de contrôle lancé à pleine vitesse. Sur sa trajectoire, soit il emprunte la voie de gauche où se trouve une femme enceinte, soit il emprunte celle de droite où il percutera plusieurs personnes âgées. Quelle est la meilleure ou la moins pire des options?  Qui faut-il sacrifier?» Un choix éthique qui, il a été démontré, dépend énormément du contexte culturel. Or, il est crucial de comprendre la décision de la machine, d’en expliquer le pourquoi et le comment, de savoir si les données d’entraînement sont correctes! Or, «ce sont les stéréotypes humains qui se reflètent dans ces systèmes, explique Mascha Kurpicz-Briki, professeure à la Haute école spécialisée bernoise, on l’a vu notamment avec des logiciels de recrutement pour trier des candidatures. Ceux-ci non seulement n’étaient pas transparents, mais favorisaient la discrimination.» On le voit l’intelligence artificielle ne soulève pas que des questions technologiques, loin s’en faut! «Avec nos trois universités, nos cinq HES, nos instituts de recherches, nos PME et nos grandes entreprises, la Région capitale suisse peut être un véritable laboratoire pour tester ces nouveaux concepts. Nous avons une interdisciplinarité naturelle dont il faut profiter !», conclut Denis Lalanne.

Trois questions posées à ChatGPT et les réponses brutes de cette intelligence artificielle:

Pourquoi l’IA (Intelligence Artificielle) est super?
L’IA  est considérée comme «super» car elle a la capacité de réaliser des tâches qui nécessitent une grande capacité de traitement de l’information et de résolution de problèmes, de manière rapide et efficace. Elle peut également être utilisée pour automatiser certaines tâches répétitives et fastidieuses, ce qui peut libérer du temps pour les humains et leur permettre de se concentrer sur des tâches plus complexes et créatives.

Pourquoi la Suisse est le bon endroit pour développer une IA «éthique»?
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles la Suisse pourrait être considérée comme un bon endroit pour développer une IA éthique. Tout d’abord, la Suisse a une réputation de pays stable et prospère, avec une économie solide et un système juridique efficace. Cela peut être un atout pour les entreprises qui souhaitent développer de nouvelles technologies de l’IA de manière responsable et durable. Deuxièmement, la Suisse est également reconnue pour son engagement en faveur de la transparence et de la responsabilité en matière de développement de l’IA. Enfin, la Suisse est un pays multilingue et cosmopolite, avec une forte tradition de recherche et d’innovation, ce qui peut être un avantage pour les entreprises qui cherchent à collaborer avec des experts du monde entier pour développer de l’IA de manière éthique.

Quand l’IA va-t-elle changer ma vie?
L’IA est déjà en train de changer la vie de nombreuses personnes dans le monde entier, et cela continue de se développer rapidement. L’IA est utilisée dans de nombreux domaines, tels que la finance, la santé, les transports, les communications et l’éducation, pour automatiser certaines tâches, améliorer les processus de travail et fournir de nouvelles expériences de communication et de collaboration. Il est difficile de prédire exactement comment l’IA va continuer à évoluer et à influencer notre vie dans l’avenir, mais il est probable que son utilisation se développera encore dans de nombreux domaines et qu’elle continuera à jouer un rôle important dans notre vie quotidienne. Il est important de rester informé sur les développements de l’IA et de comprendre comment elle peut être utilisée de manière responsable et éthique afin de tirer le meilleur parti de ses avantages.

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The long and winding road! Après un détour par l'archéologie, l'alpage, l'enseignement du français et le journalisme, Christian travaille depuis l'été 2015 dans notre belle Université. Son plaisir de rédacteur en ligne? Rencontrer, discuter, comprendre, vulgariser et par-ta-ger!

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