Faut-il regarder la Coupe du Monde au Qatar? Faut-il au contraire la boycotter? Choix cornélien pour les fans de football. Professeur de théologie et amoureux du ballon rond, François-Xavier Amherdt prend position… sans botter en touche.
François-Xavier Amherdt, suivrez-vous la coupe du Monde au Qatar?
En tant qu’arbitre de football depuis 46 ans (dont 5 en ligues supérieures), prêtre catholique et professeur de théologie, je suivrai les résultats de la Coupe du Monde au Qatar, surtout du fait que la Suisse y prend part, mais sans regarder les parties. Je dois dire que j’éprouve, bien sûr, un sentiment de malaise devant la situation, comme tant d’autres.
Etes-vous rongé par les remords?
Comment soutenir sans arrière-pensée cette «désolation» de la part de la FIFA d’avoir, encore plus que d’habitude, cédé aux sirènes des riches et des puissant·e·s, au détriment des petit·e·s ? Ce Mondial est un véritable «scandale» inadmissible, au vu de l’exploitation éhontée des ouvrières et des ouvriers, du nombre élevé de travailleuses et travailleurs tué·e·s, du non-respect des droits de la personne humaine. C’est aussi une catastrophe écologique, surtout que ce n’est qu’après coup, quand les responsables ont pris conscience (!) des températures estivales dans ces régions du globe, que les dates de la compétition ont dû être repoussées à novembre, bousculant ainsi tous les calendriers des championnats nationaux. Et cela va continuer: nous venons d’apprendre l’attribution des Jeux asiatiques d’hiver pour 2029 à… l’Arabie Saoudite, en plein milieu du désert. Stupéfiant!
Eric Cantona et Philipp Lahm ont déclaré vouloir boycotter la manifestation. Les comprenez-vous?
Je puis comprendre ces fortes figures du foot international, l’une française et l’autre allemande. Je trouve intéressant et positif qu’elles fassent, en tant qu’anciennes «stars», entendre une voix «morale» dans ce concert du sport business. Reste qu’on peut bien leur rétorquer qu’elles ont, elles aussi, bénéficié des sommes folles qui circulent depuis des décennies dans cette industrie du ballon rond. Et que d’autres Coupes du monde n’ont pas non plus été exemptes de reproches éthiques, comme, par exemple, celle organisée en Allemagne en 2006.
Les sélections nationales devraient-elles purement et simplement boycotter l’événement ou, à tout le moins, marquer leur désapprobation?
La question du boycott pur et simple est délicate car la participation au tour final est le fruit d’un long processus de qualification et les équipes représentent chacune, dans une certaine mesure, leur peuple. Je fais la distinction entre les joueurs, la FIFA et les organisateurs. Même si elles sont, dans une certaine mesure, toujours partie prenante du système, les sélections nationales «n’y sont pour rien» dans le choix aberrant des délégué·e·s de la FIFA. Et la Nati «mérite» notre appui, malgré le contexte.
Que recommanderiez-vous alors aux joueurs de la Nati?
Si c’est possible, il s’agirait pour les joueurs de faire en sorte de ne pas s’afficher ostensiblement aux côtés des autorités politiques qataries et sportives de la FIFA et de ne pas manquer une occasion, dans leurs communications, d’exprimer leur désapprobation, dans les limites que leur fixent leurs responsables nationaux. Mais il aurait déjà fallu le faire pour les sportifs lors des JO de Sotchi, de Pékin, etc. Rares sont les grandes compétitions athlétiques privées de toute «contamination et corruption»…
Comment s’expliquer que la FIFA ait attribué la Coupe du monde au Qatar?
Il convient vraiment que la FIFA tienne compte des réactions d’indignation, à travers la planète foot, et ne reproduise plus de telles attributions. Mais nous savons combien les réformes internes de pareilles institutions, comme également le CIO, sont difficiles et longues à réaliser. Je ne suis pas sûr que le président actuel, Gianni Infantino, quoiqu’haut-valaisan comme moi, soit vraiment disposé à nettoyer les écuries d’Augias, laissées dans un piètre état par son prédécesseur Sepp Blatter, lui aussi haut-valaisan! En témoigne son déménagement récent vers les pays du Golfe…
En tant que simples citoyen·n·es, que pouvons-nous faire pour infléchir les décisions des élites dans un sens qui soit plus respectueux de l’humain et de l’environnement? Et vous, personnellement, comment vous y prenez-vous?
Je n’omets aucune possibilité, notamment par des articles, dans mes conférences et mes interventions, de dénoncer les malversations en cours. Si les prises de paroles des simples citoyen·ne·s que nous sommes se multiplient, peut-être que cela pourrait infléchir quelque peu les réflexions et orientations des élites. A cet égard, les «coups de gueule» d’anciennes gloires du football, joueurs, dirigeants, entraîneurs, pourraient avoir un certain poids. Sans que je me fasse d’illusions, naturellement.
Cette coupe du monde fait-elle l’objet de débats dans les milieux de l’Eglise?
Oui, bien sûr, dans les groupes et Services «Sport et foi», attachés à diverses Conférences des évêques, les dérives de l’argent fou et de la place de la politique au sein du monde sportif font l’objet de débats et d’interpellations. J’en parle moi-même dans mes cours autour de la «pastorale du sport».
Et parmi les footballeurs que vous côtoyez?
Nous essayons aussi de sensibiliser les footballeurs et cadres que nous connaissons pour que, à tous les niveaux, on se rende compte qu’on ne peut plus continuer comme cela. C’est un peu comme pour la crise climatique et environnementale. Nous allons vers une impasse. Et cela vaut la peine de réagir: en témoigne la volte-face des tout grands clubs européens qui, devant la levée de boucliers de toutes origines, ont renoncé à leur projet inepte de «Super Coupe d’Europe»!
Bref! Serez-vous devant votre poste de télévision le 20 novembre prochain?
Je ne serai pas devant mon poste de TV, le 20 novembre prochain. Mais je m’inquiéterai évidemment des résultats et lirai les compte-rendus… Hop Suisse!
- Page de François-Xavier Amherdt
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As a former student of the Economics Faculty of Fribourg University now working in my country Uganda, l am grateful for the quality education l received . Uni Fribourg media communications is doing great work to keep us informed about our former University that left 29 years ago.
Thank you for your enthusiastic message. Keeping a close-knit university community is very important to us and we are delighted that you are following us from Uganda. We wish you a good read and all the best for the future.