Ce cours propose d’étudier le rôle des religions monothéistes en tant que grand fait social dans la vie des sociétés européennes. Dans les luttes pour imposer des Weltanschauungen et des projets nationaux, quel est l’impact du facteur religieux, entre ce que l’historien René Rémond a qualifié d’âge libéral de la sécularisation initié avec la Révolution française, et le second âge de la sécularisation marqué par les guerres mondiales et la division de l’Europe ? Du Kulturkampf aux débats actuels sur le genre et la morale sexuelle, les religions ont tantôt été des facteurs de désunion et de violence, tantôt des facteurs d’union et de dépassement des divisions politiques et culturelles en Europe. Si elle s’est globalement accélérée depuis les années 1960, la déprise de la religion sur les sociétés n’est ni linéaire, ni à sens unique. Cette histoire peut être étudiée sous l’angle des « guerres culturelles » qui l’ont marquée, à savoir des crises autour d’enjeux politiques et idéologiques, où telle confession est convoquée par ses tenants comme antidote à une évolution jugée négative, et dénoncée par ses opposants comme un obstacle ou un danger au projet culturel ou national. La littérature sur la question focalise souvent sur l’Europe « de l’Ouest », d’où se dégagent trois groupes de pays : ceux à très haute religiosité (Irlande catholique, Grèce orthodoxe), ceux à religiosité peu polarisée (Royaume-Uni et pays scandinaves) et ceux qui connaissent de puissantes subcultures chrétiennes et sécularistes. Le cours élargira la focale sur l’Europe centrale et orientale, trop souvent négligée dans l’équation. Étudié à l’échelle du continent, le processus  de sécularisation apparaît plus complexe encore : si aucun pays n’a échappé à l’évolution globale de la sécularisation, ils ont été soumis à des épreuves et des situations très hétérogènes : que l’on songe aux États modernes à dominante catholique ou réformée, aux monarchies pluriethniques et pluriconfessionnelles d’Europe centrale et orientale. Soumis à des démembrements successifs et aux « totalitarismes », ils ont souvent vu les aspirations religieuses mises sous le boisseau. Il en résulte certains décalages qui ont fait conclure, parfois un peu rapidement, à un « retour » ou des « retours » du religieux après la chute du rideau de fer.

Assimiler les notions (religion, confessions, sécularisation, etc.) les jalons historiques et historiographiques vus en cours, à l'appui des lectures conseillées et de références spécifiques proposées sur Moodle.
Être capable de disserter sur une question d'examen portant sur un aspect et associant plusieurs chapitres du cours.
Pouvoir exposer et comparer des situations et évolutions entre confessions, entre pays ou régions d’Europe (par exemple, en fonction des majorités confessionnelles et des relations entre Etat et Eglises), savoir discuter de l’impact du facteur religieux dans les domaines politiques et culturels, et inversement.
Savoir articuler son propos et mobiliser des exemples dans un texte organisé, sur le modèle de la dissertation historique présenté sur Moodle.

Ouvrages de base

Bled Jean-Paul, Religion et culture dans les sociétés et les états européens de 1800 à 1914: Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, dans leurs limites de 1914, Vanves, Paris, CNED SEDES, 2001.

Chenaux Philippe, L’Eglise catholique et le communisme en Europe (1917-1989): de Lénine à Jean-Paul II, Paris, Ed. du Cerf, 2009 (Histoire).

McLeod Hugh, Le déclin de la chrétienté en Occident: autour de la crise religieuse des années 1960, Genève, Labor et Fides, 2021 (Histoire).

McLeod Hugh, Religion and the people of Western Europe, 1789-1989, 2nd ed, Oxford ; New York, Oxford University Press, 1997.

Rémond René, Religion et société en Europe: la sécularisation des sociétés européennes aux XIX^e et XX^e siècles, 1789-2000, Ed. revue et mise à jour, Paris, Ed. du Seuil, 2001 (Points. Histoire H289).

Strohm Christoph, Les Églises allemandes sous le Troisième Reich, Genève, Labor et Fides, 2022 (Histoire).

+ Tomes 11 à 13 de la collection Histoire du christianisme (1830 à nos jours) :

Gadille Jacques et Mayeur Jean-Marie, Libéralisme, industrialisation, expansion européenne (1830-1914), Paris, Desclée, 1995 (Histoire du christianisme tome 11).

Mayeur Jean-Marie historien (éd.), Guerres mondiales et totalitarismes (1914-1958), Paris, Desclée, 1990 (Histoire du christianisme tome 12).

Mayeur Jean-Marie (éd.), Crises et renouveau de 1958 à nos jours, Paris, Desclée-Fayard, 2000 (Histoire du christianisme tome 13).

==> Une bibligraphie sélective figurera sur Moodle, et d’autres références seront données ponctuellement pendant le cours.