Publié le 17.11.2020

La qualité du sommeil peut être dégradée par la force de la volonté


Une bonne qualité de sommeil est déterminante pour le repos du corps et de l’esprit. Or, des chercheuses et chercheurs fribourgeois·e·s indiquent que notre volonté peut la dégrader.

Le sommeil est influencé par des facteurs biologiques (par Exemple, le rythme circadien ou l’homéostasie), mais également par des facteurs psychologiques. Après une journée stressante, on n’a généralement qu’une envie: se mettre au lit et s’endormir profondément. Malheureusement, cela reste souvent un vœu pieux. Malgré l’envie de dormir, il nous est difficile de trouver le sommeil désiré et pourtant bien mérité.

Des chercheuses et chercheurs de l’Université de Fribourg spécialisé·e·s dans l’étude du sommeil viennent de confirmer précisément ce phénomène: une étude dont les résultats ont été publiés dans la revue spécialisée Nature and Science of Sleep a démontré que notre intention de bien dormir ne conduisait pas à une meilleure qualité de sommeil. En revanche, il serait possible «de dégrader la qualité de notre sommeil par la force de notre volonté, et l’intention de mal dormir se traduit effectivement par une moins bonne qualité de sommeil», déclare la doctorante Selina L. Combertaldi, qui a mené cette recherche au sein du Département de psychologie de l’Université de Fribourg, dans le cadre du projet ERC «MemoSleep» du Professeur Björn Rasch.

Un lien établi entre les ondes cérébrales et la qualité du sommeil
Pour mesurer objectivement le sommeil, l’activité électrique du cerveau a été enregistrée à l’aide d’un électroencéphalogramme (EEG). Un accent particulier a été porté sur la qualité du sommeil global, le temps d’endormissement, la durée du sommeil paradoxal, ainsi que sur le nombre et la durée des phases d’éveil pendant la nuit, mis en évidence par l’EEG. Parallèlement, il a été demandé aux sujets de l’étude comment ils avaient dormi durant la nuit. Ces données subjectives ont ensuite été comparées aux mesures objectives.

Au total, 22 jeunes dormeuses et dormeurs ont pris part à l’étude de l’Unifr. A cet effet, ils ont passé trois nuits dans le laboratoire du sommeil. Avant chaque nuit, les participantes et les participants ont eu pour consigne de dormir «le mieux possible», «le plus mal possible» ou «normalement». La méthode à utiliser pour y parvenir a été laissée à l’appréciation de chacun·e.

Les sujets se réveillent plus souvent quand ils ont décidé qu’ils dormiraient mal
Les chercheurs Selina L. Combertaldi et Björn Rasch ont pu démontrer que l’intention de moins bien dormir avait pour effet d’accroître le temps d’endormissement, plus que doublé. Parallèlement, les participantes et les participants ont pu augmenter d’environ 70 % le nombre de réactions de réveil durant la nuit. Cela ne s’est cependant pas traduit par un temps d’éveil plus élevé. Les sujets de l’étude sont ainsi parvenus à dégrader sensiblement la qualité objectivement mesurable de leur sommeil.

La force de la volonté dégraderait non seulement le sommeil et la qualité objectivement mesurable de celui-ci, mais aussi son appréciation subjective le lendemain matin. Les participantes et les participants estiment ainsi avoir, par la force de leur volonté, plus que triplé leur temps d’endormissement. De même, leur appréciation de la qualité du sommeil le lendemain matin est nettement plus mauvaise. La dégradation perçue de la qualité du sommeil a même été plus marquée que ne l’indiquent les mesures objectives.

«Ces résultats revêtent potentiellement une importance centrale pour une meilleure compréhension de l’apparition des troubles du sommeil. Pour la première fois, nous avons pu démontrer que la seule force de la volonté pouvait déclencher une mauvaise qualité de sommeil chez des personnes saines. On observe chez les sujets de notre étude le même phénomène que chez les personnes souffrant de troubles du sommeil: l’appréciation subjective d’une mauvaise qualité de sommeil dépasse nettement le niveau indiqué par les mesures objectives», explique la psychologue Selina L. Combertaldi. 
 

  • Source: Combertaldi SL, Rasch B. Healthy Sleepers Can Worsen Their Sleep by Wanting to Do so: The Effects of Intention on Objective and Subjective Sleep Parameters. Nat Sci Sleep. 2020; 12:981-997. Date de publication: 11.11.2020.
  • MemoSleep: Le projet «Longing for a good night’s sleep: A memory-based mechanism to improve sleep and cognitive functioning (acronyme: MemoSleep)», dirigé par le professeur Björn Rasch de l’Université de Fribourg, a été financé par une ERC Starting Grant. L’objectif du projet est de déterminer comment les concepts psychologiques activés avant le sommeil peuvent influencer le sommeil objectivement mesurable. Il s’agit de trouver des solutions pour aider les personnes souffrant de troubles du sommeil liés au stress ou d’autres personnes (âgées notamment) à retrouver un sommeil reposant sans médicaments.