Biologie04.09.2020

Extinctions de mammifères: les humains sont responsables


96% des extinctions des 126'000 dernières années sont dues à la présence humaine et non au climat, estime une nouvelle étude initiée par les Professeurs Daniele Silvestro de l’Université de Fribourg et Tobias Andermann de l’Université de Göteborg.

Le taux d’extinction des mammifères est actuellement plus de mille fois plus grand que le taux naturel, et cette augmentation est causée presque exclusivement par les humains. La nouvelle étude suggère que l’humanité a eu une influence beaucoup plus grande que les changements climatiques sur la biodiversité, même comparée à des variations de température aussi importants que le dernier Age Glaciaire. Réalisée en collaboration avec des chercheuses et des chercheurs  suédois , suisses et anglais, l’étude vient d’être publiée dans Science Advances.

Des fossiles de 351 espèces de mammifères disparus
Les scientifiques ont collecté une vaste quantité de données sur les fossiles de mammifères, y compris des fossiles originaux. Ils ont identifié 351 espèces de mammifères disparus, y compris les cas bien connus des mammouths, des tigres à dent de sabre et des marsupiaux d’Australie. Ces extinctions ne sont pas réparties régulièrement dans le temps, mais montrent des pics d’extinction, qui coïncident de manière remarquable avec les époques où les humains atteignent les différents continents et îles après leur sortie d’Afrique. Plus récemment, les taux d’extinction se sont accélérés, cette fois globalement, à mesure que la population humaine augmentait.

La coïncidence entre l’arrivée des humains et la disparition des mammifères avait déjà frappé les chercheurs, par exemple dans le cas des grands animaux du continent Américain. Ce qui est nouveau, c’est que cette étude ne se concentre pas sur une région et certaines espèces, mais considère tous les continents et tous les mammifères éteints, y compris de nombreux rongeurs, dont la disparition est moins spectaculaire. Une modélisation avancée permet de combiner l’effet des humains et du climat, et de tester précisément leur influence respective. Certains chercheurs estiment que les changements climatiques liés au dernier âge glaciaire ont joué un rôle important, par exemple pour des espèces iconiques comme les mammouths ou les rhinocéros laineux. L’étude publiée cette semaine apporte des arguments solides en faveur d’une influence prépondérante du peuplement humain. «Les mammouths, par exemple, ont survécu à de nombreux âges glaciaires avant le dernier et il n’y a aucune raison climatique pour qu’ils ne survivent pas en Sibérie aujourd’hui» ajoute Daniele Silvestro.

Une vague d’extinctions en cours
Avec des modèles et des simulations sur ordinateur, les chercheurs ont pu mettre en évidence le lien étroit entre la densité d’humains et le taux d’extinction. Ils prédisent que ces taux pourraient encore augmenter rapidement – atteignant 30'000 fois le taux naturel en 2100 – si le lien actuel entre l’influence des humains et la biodiversité perdure.

Ces sombres perspectives ne sont pas inéluctables. «Nous pouvons sauver des centaines d’espèces de l’extinction avec de meilleures stratégies de conservation, conclut le premier auteur de l’article Tobias Andermann de l’Université de Gothenburg. Mais pour le faire, nous devons augmenter notre conscience collective de la crise de biodiversité à venir et prendre des mesures. Le temps presse, chaque espèce en moins est une perte irréversible d’une partie de l’histoire naturelle de notre planète.»
 

  • L'étude originale «The past and future human impact on mammalian diversity» a été publiée dans Science Advances.
  • Copyright: Tobias Andermann