Nanotechnologie25.01.2017

Parkinson et Alzheimer: portrait robot des coupables


Pour identifier un coupable, il faut être en mesure de dresser son portrait robot ou de prendre son empreinte digitale. C’est aussi valable pour les protéines responsables, par exemple, des maladies neurodégénératives. L’Institut Adolphe Merkle de Fribourg et l’Université du Michigan ont mis au point un nouveau système de mesure permettant de prendre une sorte d'empreinte digitale 5-D de ces protéines, afin de mieux cerner leur comportement dans le corps.

Les maladies neurodégénératives, telles que Parkinson et Alzheimer, pourraient être provoquées par une malformation des protéines qui sont des constituants vitaux de l’organisme humain, essentiels pour le fonctionnement de chaque cellule. Le corps en fabrique de toutes les formes, par exemple pour transmettre des messages entre les cellules, transporter de l’oxygène et accomplir toutes sortes d’autres tâches. Toutefois, elles ne se forment pas toujours correctement. Les scientifiques pensent que certaines d’entre elles, les amyloïdes, s’agrègent alors dans le cerveau. Ce sont alors ces masses collantes qui bloquent le fonctionnement normal des cellules, menant à la dégénérescence des neurones.

Passage vers une solution
C’est pourquoi, mesurer les protéines dans le sang et d’autres fluides peut donner accès à des informations précieuses. Malheureusement, il n’existe actuellement aucune méthode optimale pour les étudier. Selon les chercheurs, les techniques actuelles pour identifier les protéines équivalent à tenter de distinguer une personne uniquement sur la base de sa hauteur et de son poids. Mais les chercheurs de l’Institut Adolphe Merkle et du Michigan pourraient résoudre ce problème grâce à une nouvelle approche qui prend en compte la forme, le volume, la charge électrique, la vitesse de rotation et la capacité de se lier à d’autres molécules de chaque protéine individuellement. Ces informations représentent une sorte d'empreinte digitale 5-D, dont les chercheurs pensent qu’elle permettra de simplifier l’identification de protéines spécifiques et d’en donner un portrait plus complet. La méthode se base sur l’utilisation d’un nanopore: un passage dans une surface large d’à peine dix à trente nanomètres, si petit que seule une molécule de protéine peut passer à la fois. Le nanopore est rempli d’une solution saline à travers de laquelle circule un courant électrique. Quand la molécule passe par le nanopore, son mouvement cause des fluctuations dans le courant. En mesurant ces fluctuations, les scientifiques peuvent déterminer la signature unique de la molécule et l’identifier instantanément.

«Les molécules d’amyloïdes varient non seulement beaucoup en taille, mais aussi en forme et en toxicité, ce qui les rend encore plus difficiles à étudier, explique Michael Mayer, professeur de biophysique à l’AMI. Mais en les observant une par une et dans leur strucutre agrégée, cette nouvelle méthode nous donne une meilleure vision de leur comportement dans le corps.» Ce procédé permettrait ainsi aux médecins de mieux suivre la maladie d’un patient ou de développer de nouveaux traitements. Les scientifiques pourraient également l’utiliser pour mieux comprendre l’implication des amyloïdes dans les maladies neurodégénératives. L’objectif des chercheurs est désormais de développer un appareil permettant aux médecins et aux scientifiques de mesurer rapidement les protéines contenues dans un échantillon de sang ou de tout autre fluide corporel. A terme, cette technologie pourrait aussi être appliquée pour la mesure de protéines associées aux maladies cardiaques; d’autres applications ne sont pas exclues.

Article paru dans Nature Nanotechnology
Yusko E.C., Bruhn B.R., Eggenberger O.M., Houghtaling J.,  Rollings R.C., Walsh N.C., Nandivada S., Pindrus M., Hall A.R., Sept D., Li J., Kalonia D.S., Mayer M. Real-time shape approximation and fingerprinting of single proteins using a nanopore, Nat. Nanotech., 2016